Créé au Théâtre de St-Gervais - Genève du 12 au 22 février 2004.
Tourné au Théâtre de Cluny, Théâtre de la Seyne-sur-Mer en 2004
Tourné à la Scène Nationale de Mâcon, au Relais culturel de Château-Rouge-Annemasse,à la Scène Nationale de Poitiers en 2005
Un orateur tient un meeting avec le renfort d’un orchestre de fanfare essoufflé qui joue quelques marches militaires. Sont-ils en train de répéter ?
Oui, puisque les réactions de la foule, acclamations et hourras sont préenregistrés. L’orateur semble aimer entendre les foules qui l’acclament. Il sait bien appuyer sur le bouton du magnétophone pour les déclencher, il en abuse.
Pourtant cet orateur imaginé par Kagel est bien devant un public, nous. Peut-être sommes-nous dans un de ces shows télévisés où l’on exhorte les spectateurs à applaudir au bon moment ? Ou alors devant l’une de ces sitcoms qui nous imposent les réactions d’un faux public qui réagit et s’esclaffe à notre place ? Ou serions-nous réellement dans un meeting ?
Mais pendant que nous nous interrogeons, la fanfare militaire laisse échapper une plainte, une nostalgie de valse, l’orateur se prend les pieds ou plutôt la langue dans son discours et verse une larme sentimentale, la catastrophe se profile, ne joue-t-on pas Dix marches pour rater la victoire ?
Bien sûr lorsque Kagel écrit le Tribun en 1978, il dénonce les dictateurs d’Amérique Latine, les Pinochet et Videla, bien sûr comme Charlie Chaplin dans le Dictateur il dénonce le fascisme grâce à la parodie. Parce que le grotesque est un élément essentiel, constitutif du fascisme, parce que sa satisfaction à l’être fait peur, fascine.
Faut-il dire qu’aujourd’hui il n’y a pas à chercher très loin à l’intérieur et à l’extérieur des successeurs à ces tribuns ? Oui, il est malheureusement important de le dire et de le redire. À l’heure où chaque camp se renvoie le qualificatif de fasciste, le texte de Kagel remet justement les choses en place.
Photos : copyright Nicolas Lieber